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Cajas Magicas : hojalatería et couleurs du Mexique

Les peintures méticuleuses aux couleurs vives et le métal au relief argenté, l’ont inspiré pour créer cette collection de coffrets précieux



Les coffrets de Marc Fillon tirent leur inspiration dans la région de Oaxaca au Mexique, lieu du merveilleux où sourd encore, jusque dans les fièvres de ses artistes, l’inépuisable appel des origines amérindiennes. L’art et les artisanats mexicains n’ont jamais cessé de puiser dans ces vestiges précolombiens leurs motifs, leurs symboles et leurs couleurs.


Quand les colons apportent leurs objets sacrés (crucifix, châsses-reliquaire...) et leurs techniques (le champlevé, les incrustations de pierres…) l’artisanat local s’en empare et les reproduit avec les matières disponibles. Se développe alors l’Hojalata, qui désigne ces feuilles d’acier étamées, frappées, repoussées et poinçonnées, qui dans la culture populaire mexicaine, continue à produire en masse, des lanternes, des cœurs sacrés, des coffrets en tout genre, de la boîte à bijou à la boîte à biscuit. C’est dans l’atelier d’Hojalatería de Ricardo Santiago à Oaxaca que Marc Fillon a appris cette technique afin de confectionner lui-même les éléments métalliques de ses coffrets. Aux motifs floraux ou figurés et à la couleur dont sont parfois pourvus ces objets, Marc Fillon décide quant à lui de laisser l’éclat du métal vierge et privilégie les motifs géométriques.


La couleur est incontournable du Mexique. Dans les coffrets, elle est apportée par le bois peint par les artisans créateurs « d’Alébrijes ». Cette autre apport aux cajas magicas est à trouver dans le rêve d’un homme, Pedro Linares, à qui apparut dans la nuit des animaux hybrides criant « Alebrijes » et dont il commence à reproduire l’apparence dans des sculptures en bois de copal. Depuis ce rêve dans les années 30, au papier mâché s’est substitué le bois et la blancheur initiale des sculptures s’est vêtu des motifs aux couleurs vives du Mexique. C’est toute une mythologie populaire naissante qui développe alors un artisanat nouveau. Pour cette raison, le bois des cajas magicas a été peint dans l’atelier d’Estéban Hernández-Torres, Oaxaca, dans le respect des techniques et des goûts habituels de ses artisans : ainsi leur diversité et leurs couleurs.


L’intention première de Marc Fillon est de mettre à l’honneur la richesse des traditions populaires mexicaines exprimée dans ces productions : un patrimoine qui ne demande qu’à être mieux connu. Son vœu est aussi de promouvoir le travail conjoint des artisanats. En croisant leurs savoir-faire et leurs inspirations, il devient possible de créer de nouveaux objets, de nouvelles formes et même de nouveaux mythes. A l’appui de cette richesse culturelle sans cesse renouvelée, on peut dès lors générer encore de la magie. Créer des hybrides, marier des techniques différentes ou laisser la matière se donner sa propre forme, c’est continuer à engendrer de l’énigme, qu’incarne pour les Mexicains leur héritage précolombien ou encore la mythologie des Alebrijes. Voilà peut-être ce que les coffrets de Marc Fillon ont de magique.


En ce sens, Les cajas magicas crient aussi à leur manière « Alebrijes » : des deux artisanats, de l’étain et du bois, du métissage espagnol et zapotèque naît un objet singulier et lui aussi bigarré. L’énigme est ici contenue, matérialisée par le coffret. L’Alebrije, cet animal hybride au décor géométrique épouse désormais la forme creuse des boîtes. La caja n’est pas sans évoquer la casa et même la caza : elle est le lieu clos habité par la mémoire : individuelle, pour celui qui s’appropriera l’objet à sa guise, collective pour ceux qui sauront retrouver derrière les motifs, la matière et la technique, toute l’histoire d’une culture populaire.


L’ornementation des cajas ravive en effet un sens expressif qui renouvelle les savoir-faire auxquelles appartiennent l’Hojalata et les Alebrijes. Le décor géométrique n’a rien de secondaire mais occupe tout l’objet : véritable expression de la force vitale qui anime ceux que le Mexique et ses symboles ne cessent d’ébahir. Les motifs que l’on retrouve sur le coffret et le couvercle, d’inspiration zapotèque, n’existent vraiment que dans leur réalisation dans la matière, dans la contrainte technique du support et la main de son créateur. Le geste artisanal ne cache donc pas ses tâtonnements. La matière n’est pas là pour s’oublier au profit de l’objet : elle témoigne au contraire de l’effort de Marc Fillon à l’apprivoiser pour en tirer toutes ses ressources plastiques.


Dans cette même recherche, Marc Fillon finit par s’affranchir des motifs géométriques pour laisser la feuille de métal guider sa main et son outil. La plaque de plomb sur laquelle le métal doit être frappé, qui conserve toutes les traces des coups précédents comme un palimpseste, donne désormais à la feuille ses motifs abstraits et son relief singulier. Pour Marc Fillon, promouvoir ces artisanats passe ainsi par leur réinvention, dans une recherche constante autour des possibilités qu’offrent la matière et sa technique, de même que l’imaginaire auquel renvoie l’ornementation. Cet objet du quotidien, le coffret, dont les formes et les fonctions sont infiniment diverses, ne finit d’offrir ses capacités d’hybridation, de creuser encore la profondeur culturelle qu’il recèle et ses potentielles métamorphoses.





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