art+art Galerie a dédié son altar de muertos à Frida Kahlo, pittrice à la fois mexicaine et universelle.
La pluie et le brouillard automnal peuvent rendre l’atmosphère de la Toussaint et la commémoration de tous les fidèles défunts un peu glauque quand les chrétiens visitent les tombes familiales. Une telle journée de deuil a un fort contraste vis-à-vis de la célebration mexicaine du Jour des Morts, une façon joyeuse et différente d’honorer les défunts avec des véritables délices sensoriels, offrandes de nourriture deployées sur des autels multicolores. Ces altares de muertos découlent de l’accord de la vision du monde préhispanique -où la mort est un cycle inextricable de la vie- avec la vision catholique apportée au Mexique lors de la conquête espagnole.
Les autels sont constitués de plusieurs niveaux qui symbolisent le voyage de l’âme -de la terre jusqu’à l’au-delà- et sont ornés avec des objets qui représentent les quatre élements: on y trouve des bougies, des oeillets d’Inde (flores de cempasúchil), guirlandes et tapis colorés faits du papier decoupé (papel picado), encens, crânes de sucre ou chocolat, “pain des morts”, boissons et autres gourmandises dont les arômes et parfums seront savourés par les âmes des proches decedés; le 1er novembre c’est la tour des enfants morts ou angelitos (petits anges). La dégustation du 2 novembre est dediée aux adultes décédés lors de la festivité où les frontières entre le monde des vivants et le monde des morts se dissolvent.
Cette approche ludique, esthétique et festive atténue la peur de la mort. On peut lire dans l’Endymion de Keats: "En dépit de ce mal, le sens de la beauté retire un peu le voile de nos esprits si noirs” et Octavio Paz, mexicain lauréat du Prix Nobel de littérature en 1990, décrivait dans son ouvrage Le labyrinte de la solitude l’essentiel de la célébration: “pour l’habitant de Paris, New York ou Londres, la mort est ce mot qu’on ne prononce jamais parce qu’il brûle les lèvres. Le Mexicain, en revanche, la fréquente, la raille, la brave, dort avec, la fête, c’est l’un de ses amusements favoris et son amour le plus fidèle”.
Elena Garro, célèbre romancière mexicaine et première épouse de Paz écrit: “Je ne suis que mémoire et le souvenir que l’on aura de moi”. Pour garder le souvenir de ceux qui ont quitté le monde, les autels sont dediés aux personnes dont les portraits sont dressés.
art+art Galerie a dédié son altar de muertos à Frida Kahlo, pittrice à la fois mexicaine et universelle. l’acte psychomagique de manger un crâne sucré qui réconcilie le mexicain et la crainte funèbre lui était très familier. “Je me moque et ris de la mort pour qu’elle ne se moque pas de moi”, disait-elle. Son ultime nature norte à pastèques de 1954 est intitulée Viva la vida (Vive la vie). Frida demeure donc le meilleur example d’un people passioné qui -méprisant la mort- affirme la vie et en croque à belle dents.
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